Le développement des nouvelles technologies de l'information et de la communication est avant tout un phénomène mondial, mais on peut dire qu'il est entré en force dans la politique européenne avec la stratégie de Lisbonne en 1998. La communauté européenne voyant dans les NTIC à la fois un environnement incontournable dans le monde du travail et un potentiel de revenu et de compétitivité internationale à exploiter urgemment. Dans une approche essentiellement tournée vers le maintien de "l'employabilité" de la population, la recherche de profit et la concurrence économique avec le reste du monde, sont alors définies de grandes lignes stratégiques en vue de développer les compétences, les infrastructures, les accès, les innovations, la modernisation, les synergies, etc. Un engouement partagé à l'échelle mondiale, comme on l'a vu dans le gonflement puis l'éclatement de la spéculation sur les sociétés basées sur Internet.
Cette période a été marquée par la concentration habituelle des grandes compagnies, par la convergence entre l'offre d'accès (Internet, cinéma, etc.) et l'offre de contenus (baptisés "produits culturels") ou entre les différents canaux de diffusion (Internet, télévision, téléphone, radio). L'uniformisation des programmes (produits culturels) s'est accélérée et perfectionnée dans les grands groupes, pillant, aseptisant et asphixiant les diversités culturelles.
Loin des mass media, s'est développé un mouvement basé sur la libre diffusion de l'information et des oeuvres, produisant un large éventail de programmes informatiques et de documents de libre diffusion et rendant manifeste la supériorité morale et technique du modèle de production collaboratif sur le modèle compétitif. Et gagnant ainsi son "droit de cité" de haute lutte.
Dans le même temps, on aspire de façon croissante et légitime à ce que les nouvelles technologies soient mises au service de la démocratie tant en terme de transparence et de contrôle des institutions, que de facilitation et de multiplication des scrutins, de prise en considération des handicaps ou de mise à la disposition et au service de tous de la technologie. De fait, les institutions européennes et nationales ont lancé de nombreux programmes de développement de services administratifs en ligne, de jumelage électronique, de formation à distance, de partage de ressources...
Dans le même temps, de violentes attaques ont été portées contre des droits humains fondamentaux qu'il s'agisse de libertés individuelles (surveillance des télécommunications, délégation du pouvoir de police et de justice aux fournisseurs d'accès, intrusion dans les ordinateurs personnels...) ou collectives, par la privatisation de la culture (généralisation de la notion de "droit d'auteur", brevetabilité des idées). Attaques portées soit directement en outrepassant le droit positif, soit comme tentatives de changer le droit (européen ou national) et dont on trouve les origines dans les accords négociés à l'OMC comme dans les politiques sécuritaires ou les groupes de pressions de multinationales.
Au niveau des pratiques sociales et de l'engagement citoyen, Internet à ouvert la porte de nouvelles formes de militantisme, accélérant les échanges, multipliant les contacts, offrant enfin un media par lequel une part significative et croissante de la population peut s'exprimer. Cette nouvelle donne bouleverse l'ancien ordre établit dans lequel la parole appartenait aux riches et aux puissants, et aux plus faibles seulement les oreilles.
Paris, le 01/02/2006.